Le Futur du livre – Chenôve – 13-14 avril 2013

VisiMuZ : présentation-conférence donnée le 14 avril 2013 dans le cadre du Futur du livre

Vous trouverez ci-après le diaporama de la présentation que nous avons réalisée le 14 avril à Chenôve. Le Futur du Livre a permis de réunir tous les gens qui créent, conçoivent, bougent dans l’univers en perpétuelle transformation du livre. Auteurs, éditeurs, imprimeurs, libraires numériques et papier, consultants, ces deux jours ont donné lieu à un bouillonnement sans précédent en France.
Bien sûr, VisiMuZ était là et a présenté ce nouveau concept qui rend votre visite au musée plus riche et plus réussie.

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Le Van Gogh des musées du Vatican

Lorsqu’on pense Vatican, immédiatement il vient à l’esprit Michel-Ange et Raphaël, Chapelle Sixtine et Chambres de Raphaël. Mais, et c’est aussi une idée forte chez VisiMuZ, il est toujours important de « savoir avant de voir » et en l’occurrence de savoir, qu’une Piétà par Van Gogh se trouve dans le musée d’art religieux, donc dans l’ordre de la visite juste après les appartements Borgia. Ce musée voulu et inauguré par Paul VI n’est pas toujours ouvert et le flot des visiteurs à ce stade est tel qu’on peut passer aussi devant cette Pietà sans la voir (salle XVI).
Il peut être intéressant de s’arrêter quelques secondes sur son histoire.

Delacroix, Nanteuil et les lithographies

À l’origine, il y a d’abord une Pietà, ca 1850, 35 x 27 cm, par Eugène Delacroix, un tableau qui se trouve maintenant au Musée national d’Oslo.

Eugene_Delacroix_Pieta_Musee_Oslo

Il montre Marie et Jésus lors de la descente de Croix. C’est d’abord la solitude de la mère tentant de soutenir son fils mort qui nous frappe par rapport aux autres descentes de Croix souvent remplies de personnages.
Delacroix a peint de nombreux sujets religieux. Mais ce tableau va obtenir une renommée plus grande par la diffusion, très nouvelle à l’époque, de lithographies.
La lithographie a été inventée en 1796. La génération des Romantiques est alors la première à utiliser cette technique qui n’est ni en creux (comme la gravure en taille douce) ni en relief (comme la gravure sur bois) mais « à plat » et utilise la chimie pour que l’encre aille au bon endroit. Lorsque la lithographie est exécutée à partir d’une autre œuvre (une toile par exemple), elle sera inversée puisque la pierre devient la matrice qu’on retourne. C’est ce que l’on peut constater dans cette lithographie de Célestin Nanteuil (1813-1873) exécutée dès 1853 (ici)
La lithographie est bien inversée (effet miroir) par rapport à la toile originelle d’Eugène Delacroix.

Vincent à Saint-Rémy

À la fin de l’été 1889, Vincent van Gogh est interné à l’hôpital à Saint-Rémy de Provence. Confiné dans sa chambre, rarement autorisé à aller dans le jardin (voir par exemple l’histoire du Buisson de lilas✯✯ dans le guide VisiMuZ de l’Ermitage), il utilise parfois des gravures ou lithographies comme modèle. La copie le détend. Il confie à son frère Théo : « Je m’y suis mis par hasard et je trouve que cela apprend et surtout parfois console. Aussi alors mon pinceau va entre mes doigts comme serait un archet sur le violon et absolument pour mon plaisir. »
De cette époque datent par exemple La Bergère✯✯ , La Fileuse✯ (tous deux dans la collection Moshe et Sarah Mayer à Tel-Aviv, un superbe musée dont nous aurons l’occasion de reparler dans VisiMuZ) et Le Faucheur✯ (Memorial Art Gallery de l’université de Rochester, États-Unis) tous les trois d’après Millet, ou encore le Buste d’ange✯ d’après Rembrandt (collection privée).
On sait toujours par les lettres de Vincent à Théo, que des lithographies de la Pietà et du Bon Samaritain de Delacroix étaient dans sa chambre.

Vincent écrit ensuite :
« Ainsi cette fois-ci pendant ma maladie il m’était arrivé un malheur — cette lithographie de Delacroix la Pietà avec d’autres feuilles était tombée dans de l’huile et de la peinture et s’était abîmée. J’en étais triste — alors entretemps je me je me suis occupé à la peindre et tu verras cela un jour, sur une toile de 5 ou 6 j’en ai fait une copie qui je crois est bien sentie. »

L’incident est devenu un sujet, un prétexte à une nouvelle toile. Van Gogh, fils de pasteur, avait lui-même essayé sans succès de devenir pasteur, mais avait échoué à l’examen de théologie. Pourtant, c’est la seule et unique toile dans laquelle Vincent va représenter Jésus, ou plutôt la seule composition puisqu’une réplique en sera réalisée quelques mois plus tard. Il se distingue en cela de son ami Gauguin, souvent attiré par les sujets religieux.

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Cette peinture (42 x 34 cm) est entrée au Vatican via un don du diocèse de New York en 1973. Certains critiques ont fait remarquer que le visage du Christ aux cheveux et à la barbe rousse pouvait être identifié avec celui de l’artiste. Vincent, malade, aurait identifié alors ses souffrances avec celles du Christ.

La réplique du musée d’Amsterdam

L’artiste va exécuter une seconde version en 1890, un peu plus grande (73 X 60.5 cm), pour le docteur Gachet. Cette version est au musée Van Gogh à Amsterdam. Il est intéressant de regarder les différences stylistiques à quelques mois d’intervalle.

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Lettre à Théo d’Auvers sur Oise 3 juin 1890.
« Gachet m’a dit aussi, que si je voulais lui faire un grand plaisir, il désirerait que je refasse pour lui la copie de la Pietà de Delacroix qu’il a regardée très longtemps. Dans la suite probablement il me donnera un coup de main pour les modèles; je sens qu’il nous comprendra tout à fait et qu’il travaillera avec toi et moi sans arrière-pensée, pour l’amour de l’art pour l’art, de toute son intelligence. »
Il reste à ce moment à Vincent quelques semaines à vivre.
Enfin, selon Wikimedia Commons, mais sans qu’aucune précision et référence ne soit indiquée, il existerait une esquisse préparatoire dans la collection Bernhard C. Solomon, Los Angeles (ici)
Les Musées du Vatican, au-delà des œuvres les plus iconiques et célèbres, recèlent pour qui veut les trouver de nombreux trésors. Le guide VisiMuZ correspondant vous les détaillera dès le mois prochain.

Crédits Photographiques
Oslo : Lien : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Eug%C3%A8ne_Delacroix_-_Piet%C3%A0_-_WGA06213.jpg » User : JarektUploadBot Licence : CC-PD-Mark
Vatican : VisiMuZ
Amsterdam : Lien : http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Van_Gogh_-_Piet%C3%A0_%28nach_Delacroix%29.jpeg User Mefusbren69 Licence : CC-PD-Mark

Ne confondons pas lecture numérique et connectée.

Un titre bien technique, une réalité très concrète.

Le monde du livre est en pleine révolution, et j’aurai l’occasion d’aborder quelques points le 14 avril au « Futur du Livre » à Dijon-Chenôve. Sans préjuger des choix qui se dégageront dans 10 ans, il me semble important de faire un tour d’horizon des possibilités et des contraintes liées aux outils numériques (sites web, applis, ebooks) actuels en particulier pour le touriste nomade.

De grandes et petites réflexions, de nombreux commentaires.

Je ne parle pas des irréductibles du papier qui nous parlent du grain, du bruit des pages qu’on tourne, de l’odeur du livre, de l’expérience immersive que la lecture d’un livre papier constitue.
Je les comprends parfaitement et les rejoins pour certains types de lecture. Mais on ne lit pas de la même manière un roman policier de Donna Leon, un essai de Umberto Eco, un livre de photos d’Helmut Newton, un guide pratique, un livre de cuisine, un livre scolaire de maths, un dictionnaire, une BD adulte, etc. Et parmi ceux qui ont goûté au livre numérique, bien peu seraient prêts à abandonner cette pratique.
Je ne parle pas de ceux qui confondent ebooks et liseuses, contenus et contenant, œuvre et outil. Il en existe malheureusement encore qui sévissent sur la toile, et accrochent leurs lecteurs avec des titres aussi chocs qu’inconsistants du genre « L’ebook est mort ».
Pour ceux qui souhaiteraient une introduction aux possibilités offertes par les lectures sur liseuses ou sur tablettes, nous renvoyons bien sûr à nos précédents articles sur le blog VisiMuZ (ici).
Pour ceux qui voudraient en savoir plus la lecture on-line et en streaming et le parallèle avec l’industrie du disque, lisez l’article de Walrus-books (ici). J’aime bien ce blog, même si je ne suis pas toujours d’accord avec leurs analyses. Pour un certain type de prospective sur un monde connecté, ils ont écrit un billet (ici) dans lequel on trouve, je cite « Entendons-nous bien: je parle d’un futur à moyen terme, d’ici 10 ou 15 ans …/… On se demandera alors comment les gens pouvaient utiliser des outils non-connectés. »

Coup de g. : l’utilisation permanente d’une connexion ?

Alors connecté ou pas ? Aujourd’hui la question est risible dès qu’on sort de chez soi. Il y en a assez de ces promesses non tenues ! Assez de ces systèmes indisponibles quand nous en avons besoin ! D’où vient le problème ? La réponse est simple : « de la connectivité »
La connectivité est souvent un piège. Chaque fois que l’on a besoin d’un lien avec un serveur, on diminue la robustesse (au sens mécanique) et la fiabilité de l’usage.
Si j’ai besoin d’une information, et que cette information est sur un serveur il me faut :
– mon système client (avec une batterie chargée ou une prise de courant)
– un lien réseau opérationnel (connection)
– une bande passante et un débit suffisants (bandwidth)
– un serveur d’information disponible 24h/24 ce qui n’est pas toujours le cas (sustainability)
Alors :
– si nous sommes vendredi matin en France et que le serveur est sur la côte Ouest des USA nous avons toutes les chances de récupérer un message « serveur indisponible, veuillez ré-essayer dans quelques minutes ».
– si nous avons passé 4 heures dans les transports, nous avons toutes les chances de ne plus avoir de tension dans la batterie et l’accès à un serveur distant est beaucoup plus gourmand en énergie qu’une utilisation locale.
– si nous sommes à la campagne, nous avons toutes les chances d’avoir un message « connexion interrompue » (en 3G) ou l’impossibilité de télécharger un message simple (« débit insuffisant »)
– si nous sommes à l’hôtel, nous avons toutes les chances d’entendre que l’hôtel est désolé, que la connexion wifi existe bien, mais que malheureusement dans cette chambre il peut y avoir quelques problèmes et que nous sommes gentiment invités à nous rendre dans le hall de l’hôtel où un tabouret de bar nous sera gracieusement prêté pour pouvoir commodément consulter nos emails sur nos genoux.
Même à la maison, en pleine journée, avec un adaptateur secteur, une box opérationnelle, il n’est pas rare de rencontrer des problèmes (cela m’est encore arrivé cette semaine sur le site colissimo alors que je voulais juste créer un bordereau d’affranchissement, et cela m’a pris 45mn suite à un site « momentanément » indisponible).
Pour des analyses plus fouillées sur ce sujet, on pourra lire avec intérêt :
– Bill Mc Coy, CEO de l’IDPF ou International Digital Publishing Association, (http://toc.oreilly.com/2012/08/portable-documents-for-the-open-web-part-1.html)
– Ori Idan CEO de Helicon Books (http://www.heliconbooks.com/article/epub3vshtml5)
Alors quid des voyages ? et pire des voyages à l’étranger, avec une clé 3G au coût d’utilisation démesuré, ou dans des bâtiments étanches aux ondes wifi.

L’ebook, un livre numérique et non connecté

La solution dans ce cas consiste à rester numérique mais à n’être connecté que lorsque c’est nécessaire ou possible. Au lieu du tout ou rien, on passe alors du « tout » à « encore beaucoup » en l’absence de connexion. Évidemment, cela ne fonctionne pas pour tout. J’imagine assez mal un « chat » non connecté, ou la réception d’emails non connecté. Mais on peut écouter de la musique en étant non connecté (mp3 versus Deezer). Pour la préparation de ses visites touristiques autant que pendant les visites, la solution pour la lecture s’appelle l’ebook, au format epub de préférence (voir notre article sur la lecture sur tablette pour le débutant 2/2)
Alors, ne confondons pas numérique et connecté.
Numérique, cela signifie entre autres dans le cas d’ebooks au format epub (et même pour un livre non enrichi et skeuomorphiste http://fr.wikipedia.org/wiki/Skeuomorphisme, c’est-à-dire dont la forme reproduit sans nécessité réelle celle du livre papier), une recherche pleine page (ou plein texte) d’un mot ou d’une expression, la possibilité de copier-coller, une adaptation de la taille des caractères à sa vue, un encombrement et un poids minimum, une disponibilité ne dépendant que de soi et pas des autres. Seule la recharge de la batterie reste à assurer. Heureusement les prises électriques sont plus nombreuses que les points d’accès wifi libres.

Connecté c’est certes l’ouverture vers d’autres mondes, mais c’est aussi l’assurance de problèmes récurrents, d’une fiabilité médiocre si l’on est tant soit peu nomade, voire de problèmes de santé potentiels liés à ces ondes que certains disent sournoises.

Jean Baudrillard (1929-2007) avait écrit très justement dans Cool Memories dès 1984:
« Le principe du réseau comporte l’obligation morale absolue de rester branché ».
On peut alors paraphraser l’artiste de Street Art Miss Tic qui affiche dans une publicité « Louer, c’est rester libre » en disant:
« L’ebook, c’est rester libre »

Pour les voyages, pour le nomadisme, pour la liberté, j’ai envie du numérique, je n’ai pas envie de dépendre d’une connexion. C’est toute la différence entre l’envie et le besoin.

J’ai envie d’une connexion, elle peut m’apporter beaucoup, je ne veux pas en avoir besoin. Et cette simple phrase change tout.

Le piège des mises à jour ou la fausse autonomie de certaines applications

L’anecdote qui suit illustre à la fois les dangers de la connectivité nécessaire et comment certains fournisseurs de contenus se moquent de nous : j’avais acheté un guide sous forme d’application pour visiter une ville. Arrivé dans cette ville et à mon hôtel, la société qui m’a vendu le guide m’a proposé une mise à jour, j’ai dit oui et téléchargé la dernière version. Puis je suis parti en ville où bien sûr je n’étais plus connecté. Mon guide avait disparu (ainsi que les autres guides que j’avais achetés) des contenus de l’application, il n’était plus présent sur ma tablette au seul moment où j’en avais besoin. De retour à l’hôtel, en réutilisant l’application tout en étant connecté au wifi, j’ai récupéré mes guides sur ma tablette, mais trop tard.
J’avais acheté cette application dans un but précis. Au moment où j’ai souhaité l’utiliser, cela n’a pas été possible parce que je n’étais pas connecté (et parce que j’avais dit oui pour une mise à jour facultative mais ô combien handicapante pour la suite).
Certains prédisent que la seule solution est au tout connecté. Ils nous vantent la connexion 4G dans le TGV (ont-ils jamais emprunté un TER ?), ou la lecture en ligne, voire en payant à la page (pratique dans l’avion, quand on est à 10 pages de la fin d’un roman policier)

Le format epub sur lequel sont basés les ebooks est basé sur le langage du web (html5). Mais il embarque de plus avec lui tout ce qui est nécessaire pour éviter le besoin de connexion. Les ebooks au format epub redonnent leur liberté aux lecteurs, alors que la lecture sur le web enchaîne à la connexion web.
Enfin, on possède un ebook (sauf dans l’écosystème Kindle Amazon, qui vous concède seulement une licence de lecture et parfois vous interdit de lire les livres qu’on a achetés) et on organise comme on le souhaite sa bibliothèque numérique.

Notre conclusion sera simple. Chaque fois que l’on peut utiliser le numérique sans être connecté, nous gagnons en fiabilité, en robustesse, en liberté, en productivité ! Les ebooks sont pour la lecture aussi performants que les sites web, mais avec la sérénité du numérique déconnecté en prime.

Pour le tourisme culturel, l’ebook est la solution pratique et confortable.