Moulin rouge, Henri de Toulouse-Lautrec
• Dressage des nouvelles par Valentin le désossé (Moulin rouge), 1889-90, hst, 115 x 150 cm, Henri de Toulouse-Lautrec, Philadelphia Museum of Art
Le Moulin Rouge a récemment fait parler de lui à New York ! Pas mal pour un établissement qui a l’âge de la Tour Eiffel ! Il a en effet ouvert le 5 octobre 1889 (anniversaire dans 5 jours) sur le site d’un autre bal qui avait fermé. Il avait été conçu par ses propriétaires (Joseph Oller et Charles Ziedler) pour éclipser tous ses concurrents (dont l’Élysée-Montmartre, le cabaret de Bruant, le cirque Fernando, le Chat noir…) dans ce quartier devenu l’épicentre des divertissements parisiens. La publicité fut massive à l’ouverture. Dans un supplément du Figaro illustré, il était décrit comme « un magnifique jardin contenant plus de 6 000 personnes, à l’ombre des grands arbres …/… », avec sa scène où l’on pouvait retrouver « …/…tous les soirs, un concert-spectacle de 8h30 à 10h, avant le bal. » L’article se poursuivait en précisant qu’on y retrouvait « les artistes peintres, sculpteurs, littérateurs, membres de cercles, danseurs, enfin le Tout-Paris, joyeux. »
Lautrec fréquenta très vite ce bal où il se sentait moins un intrus qu’au bal plus populaire du Moulin de la Galette. Remarquons au passage que l’électricité a conquis les lieux (une possibilité récente mais aussi une obligation depuis le tragique incendie de 1887 à l’Opéra comique, éclairé au gaz). Lautrec le souligne en donnant au tableau une luminosité et des teintes claires qui ne lui sont pas habituelles.
Le tableau fut présenté aux Indépendants en mars 1890, puis acheté par Le Moulin rouge. Il fut alors accroché au-dessus du bar, dans le foyer, à côté d’un autre célèbre tableau de Lautrec Au cirque Fernando : Écuyère.
Quelques-uns des personnages peuvent être identifiés et constituent un échantillon intéressant de la population cliente de l’établissement. Valentin, danseur et contorsionniste, était une figure du Moulin. Maurice Guibert et Paul Sescau en haut-de-forme, sont des amis du peintre, la femme en rose au premier plan a un rôle mal défini, peut-être une prostituée accompagnée de sa voisine moins jolie, faire-valoir « qui oblige » selon le mot de Bruant. Elle était dans la « vraie vie » un modèle professionnel qui avait aussi posé pour Anquetin. Pas moins de 26 personnages, dont les plus proches du spectateur sont pratiquement en grandeur nature, peuplent ce théâtre d’ombres qui fait écho à la publicité que nous avons citée plus haut.
30/09/2015
Photo wikimedia commons : Henri_de_Toulouse-Lautrec,_French_-_At_the_Moulin_Rouge-_The_Dance_-_Google_Art_Project.jpg Usr DcoetzeeBot