Quand le cadrage est novateur et qu’en plus la lumière illumine la toile, on s’aperçoit que la tradition classique a du plomb dans l’aile !
Lavandière, 1860, hst, 81 x 59 cm, Paul Guigou, musée d’Orsay.
L’artiste, originaire du Vaucluse, a quitté Marseille pour Paris en 1863, avant de mourir à 37 ans en 1871 d’une congestion cérébrale. Il était ami du montpelliérain Bazille, et tous deux auraient dû faire partie des impressionnistes si la mort ne les avait fauchés avant. Guigou est d’abord le peintre des Alpilles, de la Durance et de la Provence. C’est un coloriste né, ses ciels sont lavés par le mistral, ses pierres chauffées par le soleil, mais c’est aussi un grand dessinateur. Courbet l’inspire, mais sans le désir du maître d’Ornans de « choquer le bourgeois ». Après sa mort, Guigou fut très vite oublié et redécouvert seulement au tournant du XXe siècle. Il est représenté à Orsay, à Boston, Chicago ou Washington et dans quelques musées de province en France mais il est très étonnant de constater que la plupart de ses toiles sont toujours dans des collections privées. La dernière rétrospective importante qui lui a été consacrée a eu lieu à Marmottan en 2005.
Cette composition, aux nuances de beige, de bleu et de gris exceptionnelles a été reprise presque à l’identique dans un autre tableau en 1862 (collection particulière), qui représente cette fois deux lavandières. Ce tableau de a fait l’objet d’un don de Paul Rosenberg (oui, le grand-père d’Anne Sinclair) au musée du Louvre en 1912.
À l’époque de notre tableau, Guigou est encore à Marseille. Son art, comme celui de Manet et ses amis quelques années après, est ignoré par les gens qui comptent dans le milieu artistique. Seuls quelques artistes et de très rares amateurs du sud de la France apprécient les oeuvres de Paul Guigou. Au nombre de ceux-ci, on trouve un certain Paul Gachet (celui de Cézanne et Van Gogh) qui est en train de terminer ses études de médecine à Montpellier.
30/11/2015
Photo Courtesy The Athenaeum, Irene