Quilleboeuf, estuaire de la Seine, 1833, hst, 88 x 120 cm, Joseph Mallord William Turner, fondation C. Gulbenkian, Lisbonne.
John Ruskin (Notes on the Turner Collection, 1857) a divisé l’œuvre de J.M.W. Turner (1775-1851) en 4 périodes. La deuxième commence après 1820.
« Il n’imite plus, du moins directement. Il met en œuvre les éléments qu’il s’est adjoint, il cherche un idéal, quelque chose qui dépasse, qui exalte la nature. Cette période se termine vers 1835.
Pendant une dizaine d’années (1835-1845), il est pleinement maître de son talent et de son génie ; il cesse de chercher un idéal, il se laisse inspirer par la nature qu’il transforme d’après sa nature, d’après les besoins essentiels de son génie. »
En 1833, il avait 58 ans. De 1830 à 1845, il a ébloui le monde. Depuis 1802, il voyageait régulièrement en France, en Suisse, en Italie.
Le tableau du jour se situe en Normandie, près de l’estuaire de la Seine, là où se trouvait le bac avant le pont de Tancarville. La nature est magnifiée, idéalisée, les vagues, qui sont le fait d’une « barre » liée à la marée, sont sans doute exagérées par l’artiste qui réinvente son monde, avec cette écume sur la gauche qui devient plus haut un vol de mouettes. Le côté dramatique est intensifié par le phare, l’église et le cimetière en arrière-plan (la trilogie du marin). Le tableau a été réalisé en atelier, une aquarelle, prise sur le vif, l’avait précédé en 1832. Lors de sa présentation en 1833, une annotation dans le catalogue de l’exposition à la Royal Academy mettait en garde contre les dangers de la marée montante pour les navires et les marins. Cette toile justifierait à elle seule s’il en était besoin le surnom de « peintre de la lumière » qui a accompagné Joseph Mallord William Turner. Les lignes sur terre s’estompent derrière les gouttes d’eau et l’humidité qui imprègnent toute la scène. Les différents cercles, du vol de mouettes aux vagues et aux nuages intensifient le mouvement.
25/04/2016
Photo VisiMuZ.